Voici les réponses aux 3 lettres que j'ai choisies.
Réponse à Aymeline : catégorie Fantaisie.
Monsieur le Comte,
Permettez moi tout d’abord de vous remercier d’avoir pensé à solliciter mes services pour vous aider. Votre lettre m’a touchée et cela aurait été un honneur pour moi de vous compter au nombre de mes clients .
Hélas, je ne suis plus en mesure de prendre en charge votre souffrance étant moi même actuellement au bord du gouffre. Soyez assuré que je le regrette amèrement mais vous qui être un damné parmi les damnés, vous comprendrez que je sois devenu un psychiatre maudit et totalement inopérant.
En effet, je n’exagère pas et j’en viens même à me demander si l’une de vos morsures ne serait pas la solution pour soulager celles du temps sur mon existence misérable.
Au départ, je me limitais à recevoir les ménagères de moins de 50 ans en manque d’amour ,les maris adultères qui n’assumaient pas de tromper leur femme avec leur secrétaire, et tous ceux qui n’avaient pas eu la chance d’être orphelins et qui subissaient les affres de leur passé familial. Bref que du banal pour un psychiatre lambda.
Mais voilà, en mal de célébrité, j’ai décidé un jour de me lancer sur le créneau porteur des créatures de la nuit afin de devenir moi même une star des psychiatres, pouvant être invité dans toutes les émissions de M6.
Au départ ce fut un vrai bonheur mais peu à peu, j’ai été submergé de demandes incongrues et à force de traiter des cas lourds je suis moi même devenu totalement dépressif. J’ai eu jusqu’à 812 créatures de la nuit amies sur ma page FaceBook. Je viens de fermer mon compte.
Imaginez mon calvaire : j’ai dû notamment prendre en charge Frédéric Beigbeder qui a littéralement lacéré 3 de mes divans à la recherche d’une hypothétique planque de cocaïne dans les accoudoirs. J’ai fini par sniffer en sa compagnie , des lignes apportées par lui et déposées sur le fessier de ma secrétaire consentante car inconditionnelle de l’auteur. J’ai du répudier définitivement Monsieur Beigbeder comme patient. Je n’en peux plus.
Je suis assailli depuis des mois par tous les blogueurs et blogueuses insomniaques de la création, à croire qu’ils se sont donnés le mot. Leur quête de sens et leur ennui existentiel me minent comme une boule de stress au fond de mes entrailles. Je n’en peux plus.
Dernièrement j’ai même été contacté pat le fantôme de Jack l’éventreur : celui ci ne peut plus exercer son activité favorite en raison des milliers de caméras de vidéo surveillance à infra rouge installées dans tous les recoins de Londres.
Je vous passe sur les écrivains en panne d’inspiration qui passent leurs nuits à essayer de décrire leurs jours, sur les stars déchues de la télé-réalité.
Le bouquet final , Monsieur le Comte, c’est ma mère qui à 70 ans passés ne rêve plus que d’aller à Ibiza pour pouvoir faire l’amour avec David Guetta, le prince des DJ noctambules.
Vous le voyez, ma vie est un enfer, je me suis saigné aux 4 veines pour répondre à tous ces patients et je me sens littéralement vidé de toute substance.
Même comme nourriture vampiresque je ne peux rien pour vous…je suis vraiment tombé trop bas.
En vous priant de bien vouloir m’excuser de cette réponse, je vous prie de croire, Monsieur le Comte, à l’expression de ma toute ma sympathie.
Docteur Sigmund Froid.
Réponse à Olivia- catégorie Roméo et Juliette
Sarah,
Je suis étonné d’avoir reçu ta lettre après 9 mois. C’est étrange, 9 mois c’est normalement le temps qu’il faut pour une naissance et si j’en crois tes mots, c’est le temps qu’il t’a fallu pour m’expliquer que tu avais besoin d’une renaissance.
Franchement tu ne manques pas d’air, toi qui était ma vie avant la mienne et qui m’ a littéralement asphyxié en t’enfuyant .
Dois je te rappeler qui est la responsable de ce naufrage ? Te souviens tu de notre avant dernière rencontre dans le terminal sud de l’aéroport d’Orly ? Ce 21 octobre, nous devions toi et moi prendre un vol pour Nice et nous installer dans notre nouvelle vie, notre nouvelle maison, un havre de paix sensé abriter notre nid douillet . J’avais réussi à changer de métier, à prendre un crédit. Pour cela, j’avais laissé mon travail, mes amis Parisiens et même ma grand-mère. Je me souviendrai toute ma vie de ses larmes sur le pallier de sa maison de retraite lorsque je lui ai dit qu’elle ne me verrai plus qu’un week-end de temps en temps. Et Toi ce jour là, tu n’as rien trouvé de mieux à me dire que tu avais besoin de temps, de réflexion, que tu n’étais pas sure de tes sentiments…qu’il fallait que je te comprennes…que tu étais instable et folle mais que tu m’aimais. Et tu es partie vers le terminal Ouest, tu as pris cet autre avion vers Venise en compagnie de ta chère Jessica.
Lors de notre ultime rencontre à ton retour de la « Dolcevita », je t’ai clairement expliqué que je ne voulais plus jamais avoir à croiser ton regard, ce regard blessé et ravageur qui a eu raison de moi à nos débuts.
Sarah, l’instabilité a ses limites, et libre à toi d’être incapable d’aimer qui que ce soit, mais je t’en prie, ne viens pas me demander pardon aujourd’hui. Je suis bien incapable de cette prouesse sentimentale et quand bien même je le serais je n’ai aucune envie de soulager ta conscience.
Néanmoins je te rejoins sur une chose : je n’ai jamais connu jouissance plus complète que lors de la fusion de nos 2 corps. J’ai en mémoire le plus infime de tes râles et je pourrais encore décrire toute la palette de nos gémissements, évoquer tous les épices de nos baisers, reconnaître le moindre de nos frissons d’amour fou. Je me damnerais pour revivre un seul de ces instants passés contre ton corps.
Tu m’étonneras toujours : non seulement tu as pensé que je pouvais te pardonner mais encore que ce pardon pourrait te permettre d’oublier. Te voilà devenue bien naïve tout à coup…comme si le pardon permettait de libérer sa conscience. Quant à moi, me voilà devenu bien aigri, bien rancunier, totalement nul en somme.
Tu vois Sarah, la rancœur est la sœur jumelle de la culpabilité et tous les mots sont vains lorsque l’amour n’est plus qu’un chagrin.
Joshua.
Réponse à Eiluned - catégorie poste restante
Chère Cassandre,
Votre lettre fut pour moi une vraie surprise, plutôt déplaisante au premier abord.
En effet, je m’efforce d’être sur liste rouge et de ne jamais communiquer mes coordonnées personnelles pour éviter ce genre de désagréments. Je suis même allergique aux publicités distribuées dans ma boite aux lettres. J’ai en effet le droit de pouvoir vivre en paix et me comporter en parfait sauvage si j’en ai envie.
Je vous trouve donc bien insolente et impertinente mais je vais être bon prince : j’aurais pu en retour vous offrir un abonnement à Marie-Claire pour avoir la paix, mais la sincérité de votre démarche m’a touchée.
Vous parlez de solitude et d’ailleurs votre prénom vous prédestine à cet état, et je sais que la solitude est terrible à vivre même si aujourd’hui, elle est devenue pour moi la seule façon de ne pas exister en paix.
Vous avez eu l’audace de me parler un peu de vous même alors je vais vous rendre la pareille.
Vous vénérez les livres , moi je me contente de les supporter. Je travaille en effet à l’annexe de la bibliothèque nationale et je passe mes journées à trimbaler des piles de livres anciens et poussiéreux, illisibles pour le commun des mortels, dans un silence de cathédrale. Vous imaginez bien que cette activité époustouflante me laisse hélas tout le loisir de cogiter, méditer et réfléchir à ma triste condition d’humain.
Quand je rentre le soir, je me cale dans mon canapé devant la télé en espérant que personne ne viendra sonner à ma porte. Les 2 femmes de ma vie sont loin de moi. La première ne m’a jamais aimé alors que je ressentais pour elle une passion dévorante et unique. J’aurais tout fait pour elle mais il n’y a jamais rien eu entre nous . La deuxième a fini par me quitter à cause de mon incapacité chronique à être heureux et à la rendre heureuse. Les 2 me manquent terriblement et je ne veux plus jamais tomber amoureux.
D’ailleurs c’est étrange d’associer tomber et amour, comme si les relations amoureuses étaient destinées à nous faire trébucher…y aviez vous songé chère Cassandre ?
Vous le voyez, vous n’avez pas frappé à la bonne porte et vous auriez mieux fait de vous adresser à Monsieur Potter. A mon avis, sa baguette magique vous aurait été bien plus utile que mes maux.
Permettez moi de vous dire que je vous trouve bien ingénue dans votre démarche. Vous n’ignorez pas que l’amitié homme femme, la vraie, est quasi impossible or je note que vous vous êtes volontairement adressée à "un inconnu" et non à une inconnue et que vous avez précisé « amicalement ».
Aussi , sans doutes êtes vous une douce rêveuse ayant passé trop de temps à lire les romances du siècle passé.
On ne tombe jamais sur son Apollon par hasard, soyez en sure chère Cassandre.
Ainsi, je ne vous dit pas merci ni à bientôt mais je vous autorise à m’écrire à nouveau si vous le souhaitez. Je retourne à ma télévision, elle au moins ne m’oblige pas à mobiliser mon cerveau pour répondre à des demandes insensées.
Bien à vous,
Alexandre.